L'ARMEE YOUGOSLAVE EN ETAT D'ALERTE AU MONTÉNÉGRO

27.05.2000

C'est le journal montenegrin Vijesti qui a révélé l'information ce samedi 27 mai 2000 "en se basant sur des documents confidentiels" dit-on: la Seconde Armée Yougoslave (en charge du Monténégro), par la voie de son général Milorad Obradovic, a ordonné l'état d'alerte de ses unités, la destruction de tout avion dans l'espace aérien montenegrin qui n'a pas reçu d'autorisation et l'arrestation des séparatistes. Ce soudain coup de force est justifié par le Général Obradovic "en raison d'indications qui font état d'une tentative d'infiltration dans les rangs de l'Armée de l'organisation terroriste "Otpor" dont les buts sont la propagation de la peur dans la population, des actions terroristes contre les militaires, les politiciens et les hommes d'affaires, le renversement d'un gouvernement légalement élu et la destruction de la Yougoslavie." Notez que le mouvement estudiantin "Otpor" est donc officiellement qualifié de "terroriste".

Otpor, fondé en 1998 par des copains d'unifs pour protester contre la promulgation d'une loi répressive sur l'enseignement supérieur, est devenu progressivement la bête noire politique de Slobodan Milosevic devant les hésitations de l'opposition dite classique de Djindjic, Draskovic & Co. Otpor revendique 50.000 membres prêts à agir dans des dizaines de villes.

On peut évidemment se poser des questions sur la pertinence et les objectifs de cette mise en alerte qui survient après une quinzaine agitée en Serbie. Pourquoi au Monténégro et pas ailleurs en Serbie? Le gouvernement a fermé les médias indépendants serbes et a ordonné l'arrestation administrative pour interrogatoire ou pour une période plus longue d'opposants politiques divers et particulièrement ceux d'Otpor dont le logo est un poing levé sur fond rouge. L'Armée Yougoslave craint probablement que si le mouvement déplace ses quartiers généraux au Monténégro, il serait ainsi à l'abri de la répression et pourra mieux coordonner des actions connues pour être plus spectaculaires que celles de l'opposition classique.

Cette annonce de l'Armée Yougoslave (pas reprise officiellement sur son site Internet) intervient également à deux semaines d'élections municipales (le 11 juin prochain) dans la capitale Podgorica et dans la ville balnéaire d'Herceg-Novi. Des élections sous haute tension puisque Milo Djukanovic, le président du Monténégro, a émis des craintes quant à d'éventuelles manœuvres et mobilisations organisées par l'Armée Yougoslave dans la république le jour même des élections en vue de déstabiliser le scrutin. L'Armée Yougoslave vient toutefois d'annoncer qu'elle déplaçait d'un mois ces manoeuvres qui étaient prévues depuis un an entre le 5 et le 12 juin 2000.

Ce n'est pas la première action de l'Armée Yougoslave qui inquiète le gouvernement pro-occidental de Milo Djukanovic. Juste après l'agression de la Yougoslavie par l'OTAN, des unités paramilitaires sous forme d'une police militaire (7e bataillon) ont été créées dans le nord du Monténégro. Les membres de cette structure mystérieuse seraient recrutés selon des critères politiques. Il s'agirait principalement de sympathisants du parti socialiste de Milosevic et de sa branche montenegrine.

Lors de sa conférence de presse le 17 mai à Bruxelles, Milo Djukanovic avait des sentiments partagés: "Nous allons entreprendre des contacts avec l'Armée Yougoslave pour que ces élections se déroulent le plus sereinement possible. Mais nous conservons nos craintes quant aux intentions de ce 7e bataillon plus motivé par des considérations politiques pour combattre notre gouvernement démocratiquement élu que par la défense de notre pays." Lors de cette même conférence de presse, Javier Solana, le représentant de l'Union Européenne avait prévenu que "l'Europe ne restera pas les bras croisés en cas d'action de force de Belgrade au Monténégro."

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