SESSION EXTRAORDINAIRE DU PARLEMENT: LE SNP AURAIT ACHETÉ DES VOIX - ATTAQUE VERBALE DU SDP - LE LSCG FAIT SON APPARITION! - LA RÉSOLUTION DU GOUVERNEMENT ACCEPTÉE - LE RÉFÉRENDUM DEMANDÉ PAR LE SDP REFUSÉ

08.07.2000

Le Parlement montenegrin s'est réuni en urgence ce vendredi soir où il devait adopter une résolution présentée par le Gouvernement rejetant les amendements à la Constitution yougoslave votés la veille par le Parlement fédéral. L'adoption de cette résolution est attendue puisque les partis de la coalition gouvernementale disposent de 42 des 78 sièges du Parlement montenegrin alors que les partis montenegrins pro-Milosevic ont 29 députés.

Miodrag Vukovic, un des conseillers du Président Djukanovic, prévient que le Monténégro "ne va pas tomber dans le piège (de Milosevic) et faire un geste précipité" qui consisterait à réagir "de manière radicale" aux "mesures radicales de la dictature de Belgrade".

Les parlementaires du SDP (Socijaldemokratska Partija - Parti Socio-Démocrate) demandent officiellement que la population soit consultée: "Nous avons le devoir de demander aux citoyens ce qu'ils en pensent et ensuite de demander aux organes montenegrins d'agir pour préserver les intérêts des citoyens et de l'État montenegrin". Allusion à peine voilée à la demande d'un référendum sur le statut de la république.

Cedo Vracar (NS - Narodna Stranka - Parti Populaire - pro-serbe modéré et qui fait partie de la coalition gouvernementale) a déclaré à la tribune, en jurant sur ses enfants et sur Dieu, que des personnes (dont il ne citera pas le nom) du SNP (Socijalisticka Narodna Partija - Parti Populaire Socialiste du Monténégro - pro-Milosevic) l'ont approché, ainsi qu'un de ses collègues du NS, pour lui acheter son vote contre le projet de résolution déposé par le Gouvernement montenegrin: "On m'a proposé de l'argent et un appartement à Belgrade si je votais contre le Monténégro, ce que j'ai bien évidemment refusé". Cedo Vracar a aussi révélé que son fils a été renvoyé il y a deux mois de l'Académie Militaire de Belgrade alors que c'était un des meilleurs éléments tout simplement parce que son père est contre Milosevic.

20h00: dans sa présentation de la résolution, le Premier Ministre Filip Vujanovic, a effectué une critique en règle de tout ce qui s'est passé hier au Parlement fédéral: "C'est la tentative la plus brutale de destruction du Monténégro. Un tel système électoral pour la présidence transforme la RFY en État unitaire qui supprime les droits de sa plus petite composante. La RFY essaye de devenir la Grande Serbie. (...) Lorsque les modifications de la Constitution auront recues complètes force de loi (la procédure veut que le Conseil constitutionnel présente un texte défintif qui, en principe, ne devra plus être approuvé que pour la forme par le Parlement fédéral), ce sera la fin de l'État fédéral et le Monténégro deviendra une région où ses habitants n'auront qu'un sous-statut. La volonté qu'ont exprimé les Montenegrins par référendum en 1992 de participer en tant que république autonome à la RFY, sur un pied d'égalité avec la Serbie, a été bafouée".

Radenko Boskovic du SNP a quant à lui révélé que contrairement à ce qui avait été déclaré par un grand nombre de collègues de son parti, tout le monde au SNP était au courant du projet de modification subite de la Constitution.

23h00: c'est l'incident: Zarko Rakcevic, président du SDP (Socijaldemokratska Partija - Parti Socio-Démocrate) et membre de la coalition gouvernementale a critiqué le SNP en des termes très durs: "Vous et votre politique allez restez dans les plus mauvais souvenirs de l'histoire serbe, de l'histoire montenegrine, après toutes ces manipulations et coups tordus qui ont émaillé la dernière décennie. Une décennie pareille dans l'histoire de la Serbie et du Monténégro, il y a très longtemps qu'on n'a pas connu pareille chose. De la Krajina serbe en Croatie, jusqu'à la Bosnie et Herzégovine et le Kosovo, vous avez tout détruit et maintenant vous voulez détruire le Monténégro. Vous en éprouvez aucune gêne. Et vous persistez avec cette politique mon cher Monsieur Boskovic (Radenko). Vous me parlez de démocratie? Vous me parler d'internationalisme? 99% d'entre vous avez tout de même été des communistes. J'ai été communiste et suis resté internationaliste, Monsieur Boskovic, avec la différence que vous avez accepté le projet grand-serbe, que vous êtes un nationaliste grand-serbe. (...) Vous êtes de ceux qui avez bombardé Sarajevo, Vukovar et Srebrenica. Vous êtes des nettoyeurs ethniques, Monsieur Boskovic. Et avec votre prétendu "internationalisme", pouvez-vous allez à Londres, à Paris, où n'importe où dans le monde? Vous pouvez seulement aller à La Haye (siège du Tribunal Pénal International pour l'ex-Yougoslavie). Vous irez tous à La Haye, un par un. Oui, oui, à cause des crimes, à cause des crimes..."

Le SNP a alors immédiatement demandé la suspension de séance pour se concerter. Il a demandé de sanctionner Zarko Rakcevic en l'éloignant du Parlement. Lorsque la séance a repris, le Parlement a rejeté la demande du SNP par 41 voix contre 25.

1h45: le LSCG (Liberalni Savez Crne Gore - Union des Libéraux du Monténégro - indépendantistes) a fait une apparition surprise puisqu'on sait qu'il avait décidé de ne plus participer aux travaux parlementaires, mécontent de son score aux élections municipales du 11 juin dernier. Miodrag Zivkovic, le leader du LSCG, a déclaré "qu'il n'y a aucune raison de marquer cette session extraordinaire du Parlement de manière dramatique comme est en train de le faire le Gouvernement. Les citoyens ne doivent pas s'inquiéter puisque rien ne va vraiment changer".

2h45: le vote. Le projet de résolution présenté par le Gouvernement rejetant les amendements à la Constitution yougoslave a été approuvé par 36 voix pour, 18 contre et aucune abstention.

La résolution approuvée par le Parlement:

1. Le Parlement ne reconnaît et n'accepte aucun acte légal et politique qui a été adopté sans la participation des représentants légitimes et légaux du Monténégro dans les institutions fédérales;

2. Le Parlement ne reconnaît ni n'accepte la modification de la Constitution yougoslave. Cette modification a été réalisée par un Parlement fédéral illégal et illégitime (NDLR: parce que le Monténégro a été empêché d'y participer) à l'encontre des vœux des habitants du Monténégro. Il s'agit d'une attaque violente sur les droits constitutionnels du Monténégro, membre équitable de la Fédération;

3. Le Parlement appelle tous les organes de l'État à appliquer cette résolution dans la limite de leurs compétences et de ne plus se référer aux décisions prises par les instances fédérales, de prendre les mesures nécéssaires pour préserver les intérêts des habitants de la République du Monténégro et pour assurer la continuité de son système légal;

4. Le Parlement appelle tous les organes de l'État, et plus particulièrement le Ministère de l'Intérieur, les partis politiques, à contribuer par leurs activités à la préservation de la paix. L'Armée Yougoslave devra éviter d'utiliser la force contre le citoyens et les institutions publiques de la République du Monténégro;

5. Le Parlement appelle les citoyens du Monténégro, les citoyens et les groupes démocratiques de Serbie et de la communauté internationale, à participer à la résolution pacifique des problèmes de relations entre le Monténégro et les institutions gouvernementales serbes, en respectant la volonté des habitants car il en va de l'intérêt du Monténégro, de la Serbie et du Sud-est de l'Europe.

La requête du SDP (Socijaldemokratska Partija - Parti Socio-Démocrate) pour l'organisation d'un référendum sur le statut de la république a été rejeté par une majorité de vote. Il est vrai qu'un référendum, aujourd'hui, serait répondre à une provocation.

Filip Vujanovic, le Premier Ministre, a déclaré à la sortie du Parlement que "ce n'est pas la fin de la crise mais un pas significatif dans cette direction. Nous avons garantis notre souveraineté économique qui nous préservera de la destruction de la Fédération yougoslave. Maintenant, nous nous protégeons de la destruction tout court et nous allons prendre toutes les dispositions pour préserver l'État de droit".

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